Le phénomène Piteşti, son cadre totalitaire et la destruction du lien social
La procédure de rééducation qui a eu lieu à la prison de Piteşti est inséparable de son contexte très particulier. Le régime mis en place remplit les caractéristiques d’une institution totalitaire : la discontinuité, la fermeture, l’incertitude et la terreur sont présentes dans des proportions extrêmes. De cette façon, il fut possible de modifier à la fois les détenus et leurs relations – un vrai changement du lien social doit être signalé. Les relations traditionnelles, horizontales, basés sur des valeurs communes et de l’affection, ont été transformé dans des relations verticales, qui supposent une hiérarchie rigide et un meneur fort. Le changement est induit notamment par la transformation de la victime en bourreau. Le soubassement psychique de cette opération suppose le renversement du masochisme en violence, avec un important gain de toute-puissance inconsciente pour chaque rééduqué.
Radu Clit – Membre du Laboratoire de Psychopathologie psychanalytique des atteintes somatiques et identitaires (LASI), Université Paris X Nanterre.